L’heure est grave parait-il… (Conférence de Presse de M. Legault)

Hier soir alors que j’écoutais le Premier ministre M. Legault nous annoncer le retour de quelques restrictions sanitaires, j’ai senti une lourde vague de noirceur m’envahir. Non pas déçu du gouvernement qui me semble faire du mieux qu’il peut, mais déçu qu’après deux ans de pandémie, nous en soyons encore là. Puis sont venues les réactions des commerçants et des restaurateurs qui dans la période des fêtes seront les plus durement touchés par l’impact de ces restrictions. Je suis de tout cœur avec eux. Mon épouse et moi les encourageront dans les prochaines semaines.

Je me suis demandé quels impacts ces restrictions avaient sur ma vie et mon entourage. S’il y a une chose que j’ai découvert au cours des deux dernières années, ce ne sont pas seulement les nombreux impacts qu’un minuscule virus peut avoir sur notre monde, mais aussi et surtout combien cette crise ne cesse d’éclairer les recoins sombres de mon propre cœur et ses motivations profondes, parfois inconscientes. J’ai vu la taille immense de la laideur du petit bourgeois qui habite en moi. Laissez-moi vous le décrire :

Un petit bourgeois est quelqu’un qui a grandi dans la facilité et l’abondance et qui passe une bonne partie de sa vie à se divertir l’esprit dans tous les plaisirs que cette vie peut offrir aux biens-nés. Le bourgeois ne connait rien de la misère car du lieu de sa demeure, rien ne l’expose aux fracas de la vie des petites gens qui peuplent les pays du tiers-monde. Pour lui la misère est la privation d’un luxe. Ses journées sont ainsi faites que les seules personnes qu’il croisera sont ses semblables avec qui il parlera de ses dernières bonnes idées et de ses nouveaux gadgets qui agrémenteront le bonheur de ses prochains jours. Évidemment, le bourgeois n’aime pas être dérangé par les tumultes grossiers de la vraie vie, il n’aime pas être heurté par la perte de certains privilèges acquis. Ses droits et sa liberté, valeurs sacrosaintes qui lui permettent de maintenir son train de vie sont parfaitement bien comme elles sont.

Tel est le bourgeois, toujours heureux de ne pas être dérangé par la misère des réalités terrestres qui atteignent ses semblables, enfin, ceux de ses semblables qui ne sont pas de son rang. Lui demandé de réduire son activité et de se priver de quelques divertissements est une insulte qui fait violence à son intelligence. Ainsi est le bourgeois, toujours heureux de ses accomplissements. Le pire n’est pas que ce petit bourgeois existe réellement, c’est qu’il habite en moi.

Ainsi donc, hier soir en prenant connaissance des réactions tumultueuses des gens, mon esprit fut tout à coup absorbé par des grands fléaux qui ont traversés l’histoire de l’humanité. L’extrême pauvreté que j’ai vu de mes yeux en Afrique, les pestes, les tremblements de terre (Haïti) et les guerres meurtrières et les génocides ont pour l’essentiel été le quotidien de millions de personnes qui en ce monde nous ont montré ce que voulait dire avoir du courage et de l’abnégation. Mais de l’expérience de ces gens, nous n’avons rien appris.

Moi, je n’ai aucun souvenir de ces grands fléaux car j’en ai vécu aucun, je fais partie de cette infime minorité de personnes en ce monde pour qui la vie a été bonne et généreuse car je viens d’un pays où coule le lait et le miel. Je ne connais pas la faim et la nudité, je ne connais pas la maladie (grave), je ne connais pas non plus la pauvreté ni les terreurs de la nuit en temps de guerre. En fait je ne connais rien sinon le confort et l’abondance. Je suis un ignorant, voir peut-être même un arrogant. Je souffre de quoi au juste? En fait, je n’en suis pas vraiment certain car je ne manque de rien. Je mange comme je veux et quand je veux, je me couche l’esprit tranquille, ma famille va bien, j’ai des amis, une église pleine de gens aimables et encourageants qui savent prendre soin les uns des autres.

En cette pandémie qui perdure, je prends conscience que mon plus gros problème en ce moment n’est pas les restrictions sanitaires mais mon ignorance. J’ignore la misère profonde et c’est bien là la pire de mes misères. Non, je ne suis pas misérable à cause des souffrances de cette vie, je suis misérable parce que ma condition de petit bourgeois chrétien me pousse à penser que je souffre. QUE JE SOUFFRE, VRAMENT en ce moment parce qu’aller à l’église sera un peu plus contraignant qu’auparavant!

Ha, peut-être que ces nouvelles restrictions me privent de quelques divertissements. Mais non, même pas. Je peux sortir et marcher, aller au resto, au cinéma ou resté chez-moi avec Netflix. Mais il y a des restrictions qui nuisent à mon bonheur parait-il. Il parait que Noël en petit groupe est quelque chose de vraiment grave, oui, y a plein monde qui le disent à la télévision et sur Facebook. Il y a pire, il faudra être pleinement vacciné pour entrer dans une église prochainement, il parait que ça là, ÇA LÀ, c’est la goutte qui fait déborder le vase.

Hier soir, je me suis souvenu de ces images et ces films d’archive de la Seconde Guerre Mondiale. Ces photos qui nous montrent des jeunes hommes partant au front la peur dans le regard et des mamans le visage brisé de chagrin ne sachant si elles voyaient leur fils pour la dernière fois. Je revoyais les scènes terrifiantes de ces villes européennes complètement ravagés après des bombardements. Pire encore, je me rappelais avec effroi les scènes où l’on voit des milliers de Juifs entassés dans des trains de la mort, des fours crématoires d’Auschwitz et les fausses communes pleines de cadavres mutilés qu’on tentait de faire disparaitre sous des tonnes de terres boueuses. Des scènes d’horreurs bouleversantes qui m’aident à relativiser la conférence de presse de M. Legault. Pour nous, ça fait deux ans, or la Seconde Guerre à étiré le suspense pendant 6 ans dans les pires conditions.

C’est au souvenir de ces horreurs qui sont à quelque décennies derrières nous que j’ai ressenti ma seconde émotion significative de la soirée. J’ai ressenti une peine profonde pour tous ces misérables femmes, hommes et enfants qui sont morts comme on tue des bêtes. J’ai aussi eu de la peine pour notre christianisme si pauvre qui ne sait plus souffrir avec ceux qui souffrent et pour qui la seule misère ne dépasse pas la capacité d’être solidaire avec un monde en souffrance.

La bourgeoisie est une pure vue de l’esprit qui se construit généralement sur l’expérience d’une vie qui ne connait pas la vraie misère. La bourgeoisie est une forme d’aveuglement de la triste réalité de ce monde souffrant, elle est l’intention obstinée de préserver des acquis qui maintiennent l’Illusion de la liberté et de la bonne vie. Le pire des virus qui nous contamine en ce moment n’est pas la COVID-19 et ses variants, mais l’esprit bourgeois qui ne se guérit d’aucun vaccin.(R.G.)

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1 Comment

  1. Votre article sur la postmodernité est d’actualité en Occident. Oui, le petit bourgeois connait tres bien les fléaux de l’histoire que nous ont raconté les médias d’information ou nos ancetres. C’est pourquoi en temps de crise, Il riposte vivement aussitot qu’une menace survient afin de protéger ses droits et privileges car il craint les magouilles secretes de nos dirigeants et mondialistes. Il oublie la souveraineté de Dieu dans l’histoire de l’humanité et il se rebelle contre le systeme pour éviter de vivre comme dans les pays défavorisés.

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