L’affaire entourant du port du niqab lors des cérémonies d’assermentation pour obtenir la citoyenneté canadienne a fait couler beaucoup d’encre depuis quelques semaines au Canada. Est-ce que Stephen Harper à indûment récupéré cette affaire à des fins électoralistes? Bien sûr que oui. À l’opposé de M. Harper, Mulcair, Trudeau et Duceppe n’ont-ils pas aussi récupéré l’affaire à des fins politiques? Évidemment, chacun a utilisé cette affaire à sa façon en vue d’obtenir l’attention des médias, car en politique, c’est l’unique chose qui compte. Évidemment, comme au poker, Thomas Mulcair n’a pas su jouer les bonnes cartes et il a perdu. Une fois de plus, c’est ça la politique, on regarde les enjeux, on mise, on bluff; quelques fois, on gagne gros et d’autres fois on perd tout.
Je suis toujours un peu surpris lorsque j’entends des journalistes reprocher à des politiciens de récupérer des événements de l’actualité comme si il s’agissait de quelque chose d’inhabituel en politique. Cela fait partie de la joute politique. C’est ce qui donne aux politiciens de la traction auprès des médias. Les accuser de récupérer un événement qui pourrait leur donner plus de temps d’antennes télévisuelles durant une campagne électorale est comme si je reprochais à mon chat Grisou de s’énerver toutes les fois qu’un oiseau passe devant la fenêtre du salon. Vous voyez l’idée, c’est plus fort que lui, c’est dans la nature même de ses réflexes. La vraie question n’est pas de savoir si nos politiciens font de la récupération politique, mais plutôt lequel parmi eux est le plus habile. C’est décevant certes, mais c’est le système que nous nous sommes donné en Occident.
Tout n’est que récupération
Est-il possible de faire de la politique autrement? La faiblesse de notre système électoral vient de ce qu’il fonctionne en parallèle avec un autre pouvoir qu’est celui des médias. Or, il importe de savoir que ce pouvoir (4e pouvoir) est aujourd’hui redoutablement plus puissant que le pouvoir politique lui-même. Ce sont les médias qui mènent le jeu lors d’une campagne électorale, car c’est à eux que revient la décision de couvrir un tel événement plutôt qu’un autre en fonction des cotes d’écoute qu’ils en retirent. Car eux aussi ont une joute à remporter, celle des cotes d’écoute. Ajoutons à cela que les médias appartiennent à des conglomérats d’hommes d’affaires qui ont des intérêts financiers dans les choix politiques que fera l’électorat. Il serait naïf de croire à l’objectivité médiatique, car ici encore, le discours est biaisé.
Les programmes politiques, du tape-à-l’œil
Il est devenu presque impossible aux partis politiques de se doter de programmes politiques sensés qui représentent la réalité des vrais besoins de l’État, car les règles du jeu médiatique les en empêchent. Comme politicien, vous devez absolument vous assurer de présenter un programme avec des idées susceptibles de faire la nouvelle, autrement, vous n’existerez pas. C’est d’ailleurs le problème du Bloc québécois dans cette campagne. Vous devez nécessairement présenter des projets spectaculaires qui donneront à votre parti une visibilité dans les médias sinon, vous ne serez pas élu, c’est tout. D’où les promesses mensongères et grossières dont nous abreuvent les bulletins de nouvelles à tous les jours en période électorale.
Tous des menteurs
Nous aimons croire que tous les politiciens sont des menteurs compulsifs, car c’est l’affreux spectacle qu’ils nous offrent depuis des décennies. Mais attention, s’il est ainsi, c’est parce que nous le voulons ainsi. Nous voulons d’un tel système qui n’aura d’autres règles que celles qui contraignent les partis politiques à inventer des promesses qui ne seront pas respectées, mais qui pourtant, alimenteront efficacement nos illusions. Nous savons déjà qu’arriver au pouvoir le nouveau gouvernement s’excusera de ne plus être en mesure d’honorer ses promesses électorales sous prétexte qu’il n’avait pas en mains toutes les informations sur les finances publiques. Nous connaissons d’avance quelles sont les nouvelles que nous rapporterons les médias au lendemain du 19 octobre prochain et eux, les médias savent déjà que nous continuerons d’être suffisamment naïfs pour continuer à y porter attention comme si tout ça était vraiment sérieux.
Tant et aussi longtemps que les médias mèneront le jeu, les politiciens n’auront d’autres choix que de se rendre intéressant avec des promesses de baisse d’impôt et des meilleurs revenus pour la classe moyenne. Chers amis, aucun parti ne fera mieux que son prédécesseur en matière d’économie, car la réalité du contenu des finances publiques est le même pour tous les partis. Les politiciens ne sont pas tous des menteurs, mais ils n’ont pas le choix de nous mentir parce que nous leur demandons de nourrir nos illusions en échange de notre vote.
Réal Gaudreault
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