Le début de la fin (un Jésus sans le Christ)

Oui mais la fin de quoi? Non bien sûr, je ne parle pas la fin du monde mais d’une autre fin.

En cette période de l’histoire où le christianisme n’est plus une référence en matière d’organisation sociale et politique, les chrétiens en panique se cherchent un nouveau discours susceptible de leur éviter la désapprobation publique. À trop vouloir se donner un « look » pertinent qui s’alimente aux sources d’une sagesse devenue trop pudique, le christianisme évangélique s’enlise dans les sables mouvants qui pourraient causer sa propre perte. Voulant tellement cacher aux incroyants ce qui dans l’Évangile s’oppose aux valeurs de ce monde déchu, le seul message qui en reste est celui d’un Jésus sans le Christ.

Ce monde veut nos enfants

L’enjeu principal dans la bataille spirituelle qui nous oppose actuellement aux puissances de ce monde est la propriété morale et intellectuelle de nos enfants. Le saviez-vous? Bien sûr, on vous dira que vos enfants sont à vous les parents, mais ceux qui dirigent nos États les veulent aussi. Ils les veulent parce qu’ils projettent de construire en eux et par eux la matrice d’un Nouveau Monde fondé essentiellement sur une vision matérialiste et athée de l’humanité. Ce n’est pas un hasard si dans cette conjoncture, les Lois votées dans nos Parlements tendent à retirer de plus en plus aux parents des droits sur leurs enfants. Je vous recommande hautement la lecture d’un document publié par l’UNESCO en 1946 dans lequel Julian Huxley expose sans réserve cette intention des plus hautes instances politiques mondialistes[1]. Et non, il ne s’agit pas là d’un document sorti des filières abrutissantes des conspirationnistes, mais de l’ONU.

Bref retour en arrière

En 2008 le ministère de l’Éducation du Québec modifie quelques textes de la Loi sur l’instruction publique en vue d’imposer son programme d’Éthique et culture religieuse dans tout son réseau scolaire. Quelle fut la réaction des chrétiens dans cette affaire, à peine quelques soupires, sans plus. Pourtant, cette modification venait de leur enlever (sans leur consentement) le pouvoir qu’ils possédaient dans l’exercice de l’autorité parentale en matière d’éducation. Dans cette affaire, le gouvernement s’est approprié unilatéralement le droit exclusif d’imposer tous les contenus pédagogiques (à caractère religieux, moral et sexuel) qu’il veut à nos enfants sans tenir compte de notre liberté de conscience à nous les parents.[2] Vous l’ignorez peut-être chers amis, mais depuis 10 ans au Québec, vos enfants appartiennent à l’État, comme le souhaitait l’UNESCO en 1946 et J.J. Rousseau en 1760. Comment se fait-il qu’une telle manigance n’effraie pas davantage les parents chrétiens qui devraient être au courant qu’ils sont responsables devant Dieu pour tout ce qui entre dans la tête de leurs enfants?[3]

Pourquoi les parents chrétiens n’ont-ils pas réagi?

La très grande majorité des parents chrétiens du Québec n’ont par réagit parce que la très grande majorité des églises et leurs pasteurs ont préféré détourner le regard de cette inconfortable affaire. Au fond, valait mieux faire comme les chrétiens allemands qui, durant la Seconde Guerre mondiale, détournèrent les regards des trains bondés de juifs qu’on livrait à la boucherie, trouvant plus judicieux d’élever à Dieu les plus majestueux cantiques du Psautier luthérien.

Cette attitude relâchée porte un nom : le mécanisme compensatoire, c’est-à-dire, l’art de faire semblant d’être occupé à des tâches hautement sacrées comme prétexte pour éviter de se mouiller dans les causes disons, potentiellement plus périlleuses. Une compensation spirituelle de fort mauvais goût si elle en est une, car Dieu n’entend plus les cantiques de son peuple lorsque celui-ci refuse d’être le sel de la Terre. Sommes-nous assez bêtes pour croire que Dieu se laisserait émouvoir par la juste théologie qui remplit les strophes de nos meilleurs cantiques? Non, je ne crois pas! En tout cas, pas lorsque nous détournons les regards de ceux qu’on mène à l’abattoir.

« 11 Délivre ceux que l’on entraîne à la mort et sauve ceux qui vont, chancelants, au supplice. 12 Car si tu dis : « Je ne le savais pas », celui qui sait ce qui se passe au fond des cœurs, ne discerne-t-il pas, lui ? Oui, celui qui protège ta vie le sait, et il rendra à chacun selon ses actes.[4]»

Bon, je sais, la différence entre le traitement réservé aux juifs dans les camps de concentration ne se compare nullement en terme de cruauté à la perte de nos droits parentaux en matière d’éducation. Ce qui est comparable cependant, c’est cette attitude (comme en Allemagne) qui nous rend si docile à permettre l’érosion de nos obligations et devoirs envers nos enfants en échange d’une fausse paix avec l’État. En d’autres mots, nous cédons nos enfants à l’État et à sa matrice éducative anti-chrétienne pour éviter des ennuis. Faut-il savoir qu’avant d’entasser ces femmes, ces hommes et leurs enfants dans des wagons infects, la citoyenneté et les droits humains des juifs d’Allemagne avaient été subtilement charcutés à partir de 1933, soit 6 ans avant que le grand carnage? Et cela, tous les Allemands le savaient et la majorité n’a rien dit. C’est aussi en 1933 que Joseph Goebbels, alors ministre de l’Éducation du Reich allemand crée les jeunesses hitlériennes[5]. Bof, la plupart des chrétiens n’ont rien dit parce que comme, nous, ils se sont plutôt dits, il faut bien choisir ses combats.

Il faut choisir ses combats

Cette phrase trop souvent entendue dans nos cercles chrétiens est devenue avec le temps le pire des sacs fourre-tout où se débarrasser des causes embarrassantes. On se dit qu’il est beaucoup plus sage de ne pas choisir certains combats qui pourraient nous attirer l’opprobre du public et des médias.

Voilà comment certains en sont venus à dire que l’avortement, au fond, ne nous regarde pas, car nous chrétiens, n’avortons pas nos bébés et voilà, il faut choisir nos combats. Même si nos enfants participent à des séances de yoga et de méditation à caractère ésotérique à l’école, ce n’est pas bien grave, car il faut choisir nos combats. Que des couples homosexuels et des personnes transgenres viennent suggérer à nos enfants que leur identité sexuelle n’est pas nécessairement celle dont-ils héritent biologiquement à la naissance n’est pas bien grave, car, il faut choisir nos combats. Finalement, les seuls combats que choisissent aujourd’hui les chrétiens sont ceux qui leur assurent la paix et la tranquillité en échange de ce bien précieux que sont leurs enfants livrés aux mains bienfaisantes de l’État. En réalité, le discours du gouvernement aux parents québécois et canadiens est très simple : livrez-nous vos enfants afin que nous les intrusions dans nos voies en échange de quoi on vous permet de continuer à chanter des cantiques, lire votre Bible et prier aussi souvent que vous voulez. Si pour vous ce compromis vous satisfait, moi, il me donne des maux d’estomac.

Le pour et le contre

L’un des plus beaux héritages que nous ont légués les chrétiens à travers les siècles est le courage de résister devant les menaces des Empires, au risque de tout perdre. Lors des 3 premiers siècles, ils sont des milliers à avoir été livrés aux supplices parce qu’ils refusaient seulement de reconnaitre la seigneurie (kurios) de César sur leur vie. Frères et sœurs il faut comprendre que tous les discours astucieux instruits d’une sagesse qui nous invitent à éviter la croix ne sont en fait que des séductions qui nous font perdre de vue l’importance et la valeur extrême du Christ crucifié.

Notre sagesse naturelle nous conduira toujours à trouver le moyen le plus sûr d’esquiver les troubles au profit de solutions plus confortables. L’apôtre Pierre a bien tenté de convaincre Jésus d’éviter la croix[6]. N’était-ce pas plus confortable mène pour Jésus de renoncer à la croix et se consacrer plutôt à son œuvre « humaine » de bienfaisance parmi les pauvres et les paralytiques de la Judée. N’était-ce pas là un meilleur moyen de se rendre utile et pertinent socialement? Pourquoi pas? À quoi bon mourir quand on peut vivre et aider plus efficacement les démunis tout en se bâtissant une belle fortune en réputation?

Pourquoi ne pas accepter le compromis que le gouvernement Trudeau nous demande de faire en prenant nos distances de la posture « pro-vie » en échange des subventions qui permettront à nos camps d’été de rester ouverts? Pourquoi se priver des subsides gouvernementaux si le compromis est aussi peu important que les 100 000 bébés tués par an au Canada? Après tout, ce petit compromis sans grandes conséquences nous permet de continuer à rayonner au nom de Jésus? Why not??? Évidemment, j’ironise, vous l’aurez bien compris.

Mammon, le dieu des subventions

Mais voilà, le problème avec ce raisonnement est que tous ceux qui le tiennent pour juste le tiennent au nom d’une sagesse guidée sous le faux prétexte qu’il vaut mieux poursuivre nos bonnes œuvres en vue de maintenir une bonne réputation, et ce même si pour cela, il faut se livrer en esclavage à Mammon (le dieu des subventions). Or, puisque Mammon est vorace, sachez qu’il vous attend un peu plus loin sur le parcours du chemin pavé des plus beaux compromis où il vous demandera un peu plus encore. Et vous direz oui encore et encore. Vous direz oui parce qu’une fausse sagesse vous aura appris à dire OUI, comme l’esclave qui avec le temps, en vient à aimer ses chaines.

Voilà pourquoi je crois que le christianisme évangélique dans sa forme historique et récente est arrivé au début de sa fin. Non pas la fin du monde ici, mais la fin de l’aventure évangélique telle que nous la connaissons. Pourquoi? Plusieurs de nos églises sont sclérosées par des sagesses humanistes et libérales dopées aux doux arômes du compromis et du « bien paraître » à tout prix, tout ça assaisonné de nos plus belles moutures théologiques. Ce qui importe le plus est que ce monde dise du bien de nous (les chrétiens) et qu’en retour, nous disions du bien de ce monde. Le monde aime tout ce qui lui ressemble et, lorsque nous disons ce qu’il aime entendre, le monde nous aime. Mais ce « make-up » judicieusement réfléchi ne fait que cacher notre lâcheté, car, au fond, ce que nous craignons, c’est l’imminence des jours mauvais qui chaque jour s’annoncent un peu plus encore.

Très honnêtement, j’ai peur moi aussi! J’ai peur, mais ne sais que le Dieu en qui je crois n’est pas un menteur et qu’il est avec nous dans tous nos combats qui sont plutôt les siens.

Le début de quelque chose d’autre…

C’est le début de la fin d’un christianisme qui s’est incarné en Occident par ses valeurs morales et spirituelles dont il fut le principal vecteur social au cours des derniers siècles, mais à la fois, c’est tout autant le début d’un nouveau christianisme qui devra apprendre à exister dans l’opprobre et le rejet tel qu’on subit les apôtres au tout début de l’Église. Curieusement, j’ai l’impression que ce christianisme-là, qui sans être souhaitable, sera plus vivant, plus heureux malgré les dangers.

Un texte éloquent pour nous…

« 18 Si le monde a de la haine pour vous, sachez qu’il m’a haï avant vous. 19 Si vous faisiez partie du monde, il vous aimerait parce que vous lui appartiendriez. Mais vous n’appartenez pas au monde parce que je vous ai choisis du milieu du monde ; c’est pourquoi il vous poursuit de sa haine. 20 Souvenez-vous de ce que je vous ai déjà dit : le serviteur n’est jamais supérieur à son maître. S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront vous aussi ; s’ils ont gardé mes paroles, ils garderont aussi les vôtres. 21 Mais c’est à cause de moi qu’ils agiront ainsi, parce qu’ils ne connaissent pas celui qui m’a envoyé. 22 Si je n’étais pas venu et si je ne leur avais pas parlé, ils ne seraient pas coupables, mais maintenant, leur péché est sans excuse. 23 Celui qui a de la haine pour moi en a aussi pour mon Père. 24 Si je n’avais pas accompli au milieu d’eux des oeuvres que jamais personne d’autre n’a faites, ils ne seraient pas coupables. Mais maintenant, bien qu’ils les aient vues, ils continuent à nous haïr, et moi, et mon Père. 25 Mais il fallait bien que s’accomplisse cette parole écrite dans leur Loi : Ils m’ont haï sans raison.[7]»

Réal Gaudreault (Pasteur senior)

La Bible Parle (Laval)

 

[1] http://unesdoc.unesco.org/images/0006/000681/068197fo.pdf

[2] https://coalition-cle.org/media/documents/art41.pdf

[3] Deutéronome 6, Psaumes 78, Proverbe 22 :6 et plusieurs autres textes.

[4] Proverbes 24 : 11-12(Version Semeur)

[5] http://www.annefrankguide.net/fr-CA/bronnenbank.asp?oid=192469

[6] Mathieu 16 : 21-23

[7] Jean 15 : 18-25

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9 Comments

  1. Les églises évangéliques, pour plusieurs, sont devenus une grosse farce. Ce qui importe pour plusieurs est un bon bilan financier, ne pas trop insister sur le péché pour garder bonne conscience. De cette manière ils pensent assurer leur salut.

    • Vous avez raison dans une bonne mesure Louis, je le vois bien aussi. Voilà aussi pourquoi je crois qu’une période d’émondage ferait un grand bien à nos milieux évangéliques.

      • Un très gros émondage…car l’évangile de la décision a fait des dommages dans le mouvement évangélique. Et si je ne me trompe m. Gaudreault, vous comme plusieurs autres prêchiez cet évangile tronçonné ? Mais en lisant plusieurs articles de votre blogue je réalise que cela ne semble plus le cas. Vous prêchez maintenant sur la souveraineté de Dieu. Intéressant.

  2. Merci encore une fois Pst Réal de nous éclairer et de nous réveiller.C’est tellement pertinent dans une génération qui a complètement perdue ses repères.

  3. Merci de vos partages des plus pertinents. La guerre spirituelle commence à transparaître de façon plus palpable dans notre monde physique. Bien que je sois en désaccord avec les valeurs du gouvernement, quels moyens ont les chrétiens de ne pas accéder à l’éducation proposée dans les milieux d’enseignement ? Est-ce une entente tacite de la part des chrétiens où un manque de moyens pour arrêter ces changements ? 1Thessaloniciens 5. 16-22 “Soyez toujours joyeux. Priez sans cesse…” La prière me semble l’ultime moyen de nous garder sur le chemin de la vérité et de la vie en Jésus. Autrement, je me sens désespérée de voir ce monde transformer nos enfants, nos petits-enfants et nos vies. Je m’en remets entièrement à Dieu et je garde l’espérance d’un monde meilleur auprès de Jésus. Amen

    • Bien entendu Francine la prière avant toute autre chose est la chose la plus utile de toutes. Mais aussi, les églises devraient prendre au sérieux d’investir dans des projets d’écoles chrétienne. Notre église en possède une, c’est tout à fait à la portée des églises. Mais encore faut il le vouloir.

  4. Voilà certaines vérités qui sommeillent depuis longtemps dans nos églises. Et en parler méritaient une désapprobation, sinon un rejet parce qu’il ne fallait pas juger ceux qui nous dirigent. mais être soumis à l’autorité dans l’église comme dans le monde. Oui c’est vrai qu’on doit se soumettre à l’autorité, mais qu’en est t’il si on constate des situations que l’on considère non biblique, ou simplement mondaine ou non morale.
    Merci pasteur Réal pour cette franchise, ce courage.
    Pour ce qui est de l’éducation des enfants dans notre génération, je serais tenté d’y apporter ma touche personnelle, et dire que les pères, dont la moitié se sont fait évincé (par le divorce) de la famille, et une majorité de ceux qui sont encore mariés, ont perdu toute autorité en matière d’éducation à leurs enfants, voient leurs enfants éduqués avec des valeurs beaucoup plus permissives, qui ne sont pas les valeurs majoritairement masculine.

  5. (au sujet des «femmes»)
    Comme le dit l’adage: «un tango se danse à deux»

    Personne d’un peu lucide ne niera l’existence d’une certaine (terme que je souligne trois fois plutôt qu’une) influence d’un discours ambiant qualifié de «féministe enragée», mais en contre partie, personne ne niera une forme de «virilité enragée» au Québec (et ailleurs, faut-il en être avisé). Certaine abusant d’une violence émotionnelle et les autres d’une violence…tout court.

    Dans cet optique, il y a des parents des deux sexes (certaines -«terme que je souligne trois fois plutôt qu’une»- femmes abusent de leur émancipation…comme certains -«terme que je souligne trois fois plutôt qu’une»- hommes abusent d’une réaction inverse par violence (pour ne pas dire qu’ils sont “en réaction”). Mais au fond, si nous voulons être honnête, ne s’agit-il pas ici, ultimement, d’un “choc des égos” ?
    Car il s’agit bien plus souvent des désirs des uns (qui veux un peu plus liberté de choix) vs les désirs des autres (qui veut avoir l’avantage dans les décisions sur les dépenses/achats, les plaisirs de tout ordre etc.).
    Un principe m’apparait ici prendre tout son sens: Christ, le Maître et Chef acceptant de se soumettre aux pires conditions humaines. Lui qui n’a pas protester l’oppression des autorités romaines (comme les zélotes), qui s’est soumis à ses parents (Luc 2.51 ; sa mère l’ayant repris ouvertement v.48), se livrant pour l’Église, son épouse.
    « lequel, existant en forme de Dieu, n’a point regardé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu,mais s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur» Phil 2.6 ss
    Et son corollaire: «que l’humilité vous fasse regarder les autres comme étant au-dessus de vous-mêmes» Phil 2.3

    Valeur supérieur, s’il en est: «Si quelqu’un te frappe sur une joue, présente-lui aussi l’autre» Luc 6.29 Face à l’injustice (des femmes ou des hommes), que devons-nous retenir ?
    Que restera-t-il dans le ciel: notre soumission au nom de l’amour incarné par Christ ? Ou notre “sens des responsabilités” prescrit par quelques dogmes et rudiments ?

    Hommes et femmes, à sa ressemblance, combattons par sa force et pour sa seule gloire ! …pour les bonnes choses.

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