Choisir la facilité, c’est tellement plus facile

Après les tristes évènements survenus à la Mosquée de Québec le 29 janvier dernier, de nouvelles sensibilités collectives sont apparues dans le paysage social du Québec. Il aura suffi d’un geste hautement regrettable commis par un jeune homme esclave de sa folie meurtrière pour que l’émotion prenne le dessus sur la raison. Depuis ce jour, une nouvelle crainte s’est installée, celle de passer pour des islamophobes si on n’entre pas dans la ronde du raisonnement des médias qui alimentent le sentiment de la responsabilité collective. Car il est là le problème maintenant, comment se redonner un espace de réflexion convenable sur la question des limites qui s’imposent dans la gestion des accommodements raisonnables, sans pour autant passer pour des islamophobes?

Si vous êtes comme moi, vous avez probablement de la difficulté à adopter une position avec laquelle vous vous sentez pleinement confortable, n’est-ce pas? Comment bien réagir lorsqu’on est un chrétien soucieux d’être un digne témoin des valeurs gracieuses de l’Évangile, sans pour autant perdre de vue la rigueur exclusive du message de l’Évangile? Est-il possible de réussir à bien intégrer nos valeurs chrétiennes dans le tordeur du débat actuel où les réactions vives ne sont pas toujours une garantie de bon sens. Comment être à la fois un bon chrétien sans pour autant sombrer dans les complaisances capricieuses de ceux réduisent le message de Jésus à n’être rien de plus que celui d’un bienfaiteur accueillant?

Le débat coincé dans un brouillard épais

La tuerie à la grande Mosquée de Québec est un immense malheur pour la communauté musulmane québécoise. Mais à fois, cet évènement est en train d’installer un épais brouillard de confusion qui malheureusement servira les intérêts des diverses formes de radicalisme. Si d’une part on connaît trop bien la posture qui nourrit les noirceurs des radicalismes haineux et xénophobes, on connait moins bien l’autre radicalisme (posture), celui des gens complaisants qui au nom d’un amour universel (parfois dans une version chrétienne) au contour flou sont disposés à laisser les musulmans imposer leur valeur avec le moins de balises contraignantes possible. À mon avis, ce serait une grave erreur.

Choisir la facilité

Je suis de ceux qui sont inconfortables avec ces deux postures parce qu’il est trop facile d’adopter une opinion dont l’unique confort consiste à ne plus se donner la peine de réfléchir aux conséquences réelles de ce que l’on croit? C’est trop facile de se laisser gagner par les discours haineux en répétant les mêmes clichés xénophobes au nom de la préservation de l’identité québécoise. L’identité québécoise qui d’ailleurs, depuis la Révolution tranquille est devenue la propriété presque exclusive des humanistes athées, grands héritiers du Refus global de 1948. C’est aussi trop facile d’adopter l’autre discours, celui des grands apôtres de l’ouverture complaisante pour qui tout le monde est beau et gentil. Se conduire en coupable lorsqu’on ne l’est pas n’est pas une forme du courage ni d’humilité, mais de lâcheté.

Les chrétiens se disent ouverts

La vraie question à laquelle doivent répondre les chrétiens dans ce débat n’est pas si oui ou non ils doivent se montrer accueillants envers les étrangers de confession musulmane, la réponse est trop évidente, c’est oui. La vraie question est plutôt : pourquoi croient-ils qu’ils doivent être accueillants? Quelles sont les réelles motivations des chrétiens qui prônent tout à coup le discours de l’ouverture au nom du Jésus qu’ils présentent comme le Dieu qui accueille tous les hommes? Il y a dans ce discours des amalgames théologiques qui contredisent la théologie biblique. Ne sommes-nous pas ici en présence d’une forme de récupération d’une cause à des fins stratégiques pour redorer le blason d’une église jugée trop fondamentaliste dans son passé récent?

Se montrer bon, c’est payant?

Je crois à l’importance pour les chrétiens d’être là quand vient le temps de soutenir la détresse humaine, et ce, sans égard à la croyance religieuse ou même à l’orientation sexuelle des gens concernés. Et cela, les chrétiens le font déjà très bien ici comme ailleurs dans le monde. Seulement, je m’objecte à ce que ces élans de compassion soient des paravents qui cachent de vastes campagnes de revitalisation de la réputation des évangéliques. Tant mieux si les chrétiens font le bien et qu’on les remarque pour cela. Mais il y a une différence énorme entre le fait d’être tout bonnement remarqués pour nos bonnes œuvres et chercher à tout prix à se faire remarquer pour nos bonnes œuvres en vue d’être approuvés des hommes

Au risque de déranger quelques idées reçues dans nos milieux évangéliques, j’ajouterais que le mythe du Jésus hyper accueillant est plus ou moins vrai. Une relecture attentive des quatre évangiles montre bien que Jésus n’a pas reçu tous les gens à bras ouverts comme on aime le croire. Seriez-vous choqués d’apprendre que Jésus accueillait des hommes et des femmes sur la base de ses conditions à lui? Tous ceux-là qui n’ont pas reçu son message retournaient comme ils étaient venus, c’est-à-dire, bredouilles. Jésus a soulagé des gens en détresse, mais là n’était pas le point central de son œuvre.

Sa volonté n’est-elle pas que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance du salut me direz-vous? À cet égard, Dieu n’est-il pas accueillant envers tous les hommes sans exception? En fait, oui et non. Dieu accueille tous les hommes non pas sans exception, mais sans distinction et tous ceux qui refusent son offre de salut seront absents de son Royaume éternel. Cela vous choque-t-il comme chrétiens?

Certes, il n’appartient certainement pas aux chrétiens de faire ici-bas le tri entre ceux qui appartiennent ou non à Jésus-Christ. Cette prérogative est celle de Dieu. En ce qui nous concerne, détester et rejeter des gens pour des motifs religieux est non seulement une mauvaise idée, mais qui plus est, c’est là une contradiction évidente avec le message de l’Évangile. L’amour de Dieu est riche de la présence du Christ, mais cet amour ne sera jamais complaisant.

Real Gaudreault

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1 Comment

  1. Bonjour M Gaudreault, comme vous dites en quelques sortes…choisir le chemin le plus court, c’est facile. C’est non seulement facile, c’est simpliste. Choisir d’éliminer tous critères d’acceptation (ou d’exclusion), c’est une façon de démissionner. Comme l’écrivait Francis Shaeffer dans un livre éponyme, c’est littéralement une démission de la raison. Oui Jésus a aimé …mais n’a pas sauvé tous les hommes. Oui Jésus est amour…mais ce ne sont pas tous les hommes qui acceptent son amour, à fortiori, son enseignement. Il exhorte ses enfants à aimer, même ses ennemis. Cela ne veut pas dire que nous devions endosser leur perspective de la vérité.
    Nos concitoyens musulmans doivent être aimé et nous pouvons certainement accepté leur amitié, mais cela s’arrête là où commence la doctrine de Christ. Christ n’a jamais fait la “chasse au sorcière” en poursuivant les religions et/ou rituels de ses congénères. Il a dénoncé ouvertement leur conception de ce Dieu duquel lui-même était issu (et incarnait parfaitement), parce qu’il s’agissait de lui-même et son Père. Il a aussi usé d’une certaine agressivité, envers les objets (Math 15/21). Mais aucun récit ne rapporte qu’il se soit attaqué aux dieux grecs ou romains (quand on pense que ce territoire était dominé par ce dernier empire). Jésus a bien plutôt interdit les ardeurs violentes lorsqu’elles se manifestaient parmi les siens(Math.26). Il s’est même étonné au sujet d’un centenier romain (qui n’était même pas un de ses disciples “de sa garde rapprochée”) déclarant: «je n’ai pas trouvé, même en Israël, une si grande foi» Imaginez l’étonnement de certains des disciples qui ne cherchait qu’à être approuvé par Jésus…
    Jésus n’a fait acception de personne, mais n’a pas non plus, endossé tous ceux qui le côtoyait l’abordant sur toutes sortes d’idées et surtout, avec l’orgueil de leurs prétentions. Je pense à l’apôtre Pierre qui a goûté à de solides exhortations de sa part (Math 16.23). Il le préparait ministère qui arrivait.
    L’ambiance sociale actuelle, excite nos animosités les plus refoulées, soyons vigilants. Le diable rôde…
    Frères et sœurs, s’il y a une exhortation que nous devons retenir, elle se trouve dans ce verset:
    «Prenez donc garde de vous conduire avec circonspection, non comme des insensés, mais comme des sages; rachetez le temps, car les jours sont mauvais. C’est pourquoi ne soyez pas inconsidérés, mais comprenez quelle est la volonté du Seigneur. » Éph. 5.15
    Je surlignerais en particulier deux aspects: «rachetez le temps (…) comprenez quelle est la volonté du Seigneur».
    Ne prenons pas le chemin le plus court, évitons de tenir les discours ambiant et simpliste. Examinons-nous nous mêmes, comme l’exhorte Paul. Cela exige que nous nous arrêtions…le travail, les activités de toutes sortes, les loisirs, les relations, et parfois même la lecture biblique rituelle. Juste réfléchir…(Prov 3.21-22)
    Que nos pensées soient captives en Jésus-Christ, reconnaissons-le dans toutes nos voies. Il y va de notre bonheur en Lui.

    CB

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