Un christianisme faiseur de bruits telle une cymbale qui retentit…

Depuis quelques années, je m’étonne d’entendre les chrétiens s’affoler devant les nombreuses dérives du monde occidental. Que se soit par la moquerie, le sarcasme et les insultes sur les réseaux sociaux, on ne se gêne plus pour laisser libre cours aux insinuations les plus malveillantes contre des personnalités publiques. Visiblement pour de nombreux chrétiens, la sagesse qu’inspire l’Écriture ne fait pas le poids devant cette vague d’animosité qui remonte des tréfonds du cœur de l’homme naturel abandonné aux rêveries d’une rage collective.

C’est par l’expression grandissante de ces fruits au goût amère que le christianisme occidental montre qu’il s’enlise actuellement dans l’une de ses pires dérives. Une dérive aux odeurs de colère qui n’a rien de commun avec le message de l’Évangile. C’est toujours lorsqu’on ne sait plus argumenter avec intelligence que l’insulte, le sarcasme et la dérision en viennent à occuper l’espace du discours. La dérive est précisément là, ne sachant plus comment faire briller l’Évangile au cœur de l’hypermodernité au destin tragique, on choisit de reprendre l’épée de l’insulte car l’homme qui ne sait plus quoi dire aura toujours l’insulte comme arme de poing car en ces choses, nul besoin d’intelligence pour exprimer sa bêtise.

L’égarement des chrétiens est pourtant compréhensible. Croyant que ce monde aurait dû de lui-même s’affranchir de la corruption dont il est lui-même le principal vecteur par la Chute adamique, on s’indigne de la voir si perdu. Or, ce monde, nous dit la Parole, ne peut faire autrement que de manifester des fruits de perdition car dans son éloignement de Dieu, il est livré à lui-même. Lorsque l’apôtre Paul explique la problématique de l’homme sans Dieu dans sa lettre aux Romains, il montre bien que cet homme ne saurait être autrement que perdu :

« 5 En effet, les hommes livrés à eux-mêmes tendent vers ce qui est conforme à l’homme livré à lui-même. Mais ceux qui ont l’Esprit tendent vers ce qui est conforme à l’Esprit. 6 Car ce à quoi tend l’homme livré à lui-même mène à la mort, tandis que ce à quoi tend l’Esprit conduit à la vie et à la paix. 7 En effet, l’homme livré à lui-même, dans toutes ses tendances, n’est que haine de Dieu : il ne se soumet pas à la Loi de Dieu car il ne le peut même pas. 8 Les hommes livrés à eux-mêmes ne sauraient plaire à Dieu. » (Rom 8 : 5-8)

À quoi sert-il aux chrétiens de s’indigner devant un état de fait qui ne saurait être autrement? La solution ne se trouvera jamais dans la moquerie, le sarcasme et la critique malveillante mais dans la proclamation de l’Évangile par lequel l’homme est conduit à la repentance. Comme l’affirme le même apôtre dans sa lettre aux Corinthiens : « si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien de plus qu’une trompette claironnante ou une cymbale bruyante. » (1 Cor 13 : 1) (Semeur). Sommes-nous maintenant réduit à n’être rien de plus que des faiseurs de bruits, des bruits qui s’ajoutent aux bruits déjà trop nombreux, des bruits porteurs du vide qui habite ceux qui les font entendre?

Dans les faits, les grandes institutions politiques, économiques et sociales qui dominent l’espace public depuis la nuit des temps ont toujours été fidèles à elles-mêmes, c’est-à-dire : livrées au cœur de l’homme sans espoir. Alors, qu’est-ce qui a changé? Ce qui a changé est le regard que les chrétiens portent sur ces institutions. Au cours des siècles où le christianisme faisait triompher sa moralité dans ces institutions sociales, les chrétiens ont cru que les gens de ce monde aimeraient le Christ à la hauteur des espoirs attendus. Mais c’était une erreur.

L’Église des derniers siècles s’est laissé bercer par l’illusion que son triomphe serait de nature politique et juridique. On a cru que les valeurs judéo-chrétiennes convertiraient les foules de ce monde par l’imposition d’une morale biblique traduite en lois dans les Parlements de nos États nationaux. Mais puisque ça ne s’est pas produit aussi bien qu’ils l’attendaient, les chrétiens cherchent des boucs émissaires, des gens sur qui frapper pour apaiser leurs amères déceptions.

Or, de quoi cette réaction intempestive est-elle le signe? Au risque d’en déranger plusieurs, je dirais qu’elle est le signe évident d’un christianisme qui ignore presque tout des précisions relatives à la condition pécheresse de l’homme et de la souveraineté de Dieu selon l’Écriture. Ce qui pose un problème est qu’une grande partie des chrétiens délaissent la réflexion théologique au profit d’une réflexion qui se nourrit de l’émotion négative que suscite l’état actuel des choses.

L’Évangile n’est pas un message qui veut redresser la condition morale des gens de ce monde mais un message qui adresse un l’espoir du salut sur une nouvelle Terre de nouveaux cieux. Jésus n’est pas venu mourir pour délivrer ce monde de sa corruption, il est plutôt venu sauver l’homme de la corruption de ce monde. La bonne moralité est un fruit du salut et non le but.

(R.G.)

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