Entre légalisme et rigueur, la ligne et mince

C’est lors d’une récente discussion avec des chrétiens que j’ai réalisé à quel point la ligne est mince entre la rigueur spirituelle et le légalisme. En fait, bien des gens confondent les deux. Il suffit qu’un chrétien ajoute un peu de rigueur, de droiture et du zèle à sa vie chrétienne pour qu’on le suspect de légalisme. Mais qu’est-ce que le légalisme? Un comportement légaliste ne se reconnaît pas dans les gestes, mais par les intentions qui le motivent. Un légaliste fait toutes choses justes pour obtenir la faveur de Dieu alors qu’un chrétien rigoureux fait toutes choses justes parce qu’il a obtenu la faveur de Dieu.

La Loi et la grâce

Une mauvaise théologie conduit bien des chrétiens à croire que depuis la mort et la résurrection de Jésus-Christ, la grâce a remplacé la Loi de telle sorte que le comportement moral de l’homme n’intéresse plus Dieu. Être sous la grâce reviendrait à dire que Dieu a abaissé ses standards et ferme désormais les yeux sur la conduite pécheresse de l’homme. Mais il n’en est rien. La grâce n’est pas une permission (licence) pour péché, mais la fin du pouvoir du péché sur l’homme: « Car le péché n’aura point de pouvoir sur vous, puisque vous êtes, non sous la loi, mais sous la grâce.[1]»

Et pourquoi donc la Loi?

Nous savons déjà que la Loi de Moïse n’a pas été donnée afin que l’homme soit justifié par elle. « Car nul ne sera justifié devant lui par les œuvres de la loi, puisque c’est par la loi que vient la connaissance du péché.[2]». Contrairement à ce que croit un légaliste, la Loi ne peut rendre aucun homme juste devant Dieu, car elle a plutôt été donnée pour confirmer sa condition pécheresse. La Loi nous enseigne à quel point nous sommes pécheurs alors que la grâce nous enseigne à renoncer au péché, nous dit l’apôtre Paul, « Car la grâce de Dieu, source de salut pour tous les hommes, a été manifestée. Elle nous enseigne à renoncer à l’impiété et aux convoitises mondaines, et à vivre dans le siècle présent selon la sagesse, la justice et la piété.[3] »

Maintenant que nous sommes sous la grâce, la Loi a-t-elle encore un rôle à jouer dans nos vies? Puisque la Loi est un pédagogue qui nous conduit à Christ, si nous sommes effectivement sauvés, on peut affirmer qu’elle a pleinement accompli son mandat[4]. Mais à la fois, ne plus être sous la Loi ne signifie pas que cette Loi n’a plus de raison d’être dans nos vies. La Loi est toujours pour nous une Parole donnée par Dieu qui éclaire notre sentier. C’est la Loi qui demeure l’unique standard par lequel je distingue le bien du mal.

Ma conscience et ma raison doivent continuellement être instruites par la Loi, autrement, je redeviens par moi-même et pour moi-même la source (Dieu) qui interprète ce qui est bien ou mal. Or, c’est précisément ce en quoi consiste le péché depuis la Chute adamique : « vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal.[5]». Redéfinir ce qui est bien et mal sans la Loi de Dieu, n’est-ce pas justement là qu’est le péché dans toute sa splendeur?

L’amour corrompu

Une des grandes idées en libre circulation chez les chrétiens actuellement consiste à dire que l’amour de Dieu efface tout jugement moral contre le péché. Juger serait un manque d’amour. Or, c’est faux. Dieu n’excuse pas le péché, il le juge et le pardonne. S’il peut le pardonner, c’est qu’il l’a d’abord jugé, non? Et pour être pardonné, il faut reconnaitre sa condition pécheresse avec l’espoir que Dieu accordera la repentance. Dieu aime le pécheur, mais déteste toujours le péché. Le concept de l’amour de Dieu qui suppose l’abaissement des standards divins est une erreur séduisante à première vue, mais une erreur tout de même. Dieu s’est abaissé lui-même en prenant ici-bas nos fautes sur la croix, mais jamais il n’a abaissé d’un maigre iota le contenu de sa Loi.

Par son sacrifice à la croix, Dieu a effacé nos péchés ainsi que « l’acte (d’accusation) dont les ordonnances nous condamnaient et qui subsistait contre nous [6]», mais il n’a pas effacé la Loi qui a tout mis en lumière. L’amour véritable de Dieu consiste en ce que Dieu fait grâce au pécheur en lui accordant la repentance et le renouvellement de l’intelligence pour vivre en nouveauté de vie. Si l’amour de Dieu auquel vous croyez ne vous invite pas à abandonner vos propres voies, c’est donc qu’il ne s’agit pas du message de l’Évangile de l’amour de Dieu. Tout au plus ce message est une construction illusoire de l’homme, une tromperie quoi!

Conclusion

Vous n’êtes pas un légaliste si vous croyez que la vie chrétienne invite à plus de rigueur spirituelle. Vous êtes légaliste seulement si le comportement rigoureux que vous adoptez vous conduit à mépriser le faible et à croire que ce zèle vous rend plus juste devant Dieu que les chrétiens autour de vous. Un comportement légaliste ne se reconnaît pas dans les gestes, mais par les intentions qui le motivent.

Réal Gaudreault (pasteur)

[1] Romain 6 : 14

[2] Romain 3 : 20

[3] Tite 2 : 11-12

[4] Galatée 3 : 24-25

[5] Genèse 3 : 5

[6] Colossiens 2 : 14

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9 Comments

  1. Cherchons à accomplir la loi Royale :
    Tu aimeras ton prochain comme toi-même. (Jac 2.8)

    Et Jean ajoute :

    Quant à nous, nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie parce que nous aimons nos frères. Celui qui n’aime pas demeure dans la mort. Si quelqu’un déteste son frère, c’est un meurtrier, et vous savez qu’aucun meurtrier ne possède en lui la vie éternelle. (1Jn3.14-15)

    Mes chers amis, aimons-nous les uns les autres, car l’amour vient de Dieu. Celui qui aime est né de Dieu et il connaît Dieu. Qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour. (1Jn4:7-8)

    Si quelqu’un prétend aimer Dieu tout en détestant son frère, c’est un menteur. Car s’il n’aime pas son frère qu’il voit, il ne peut pas aimer Dieu qu’il ne voit pas. D’ailleurs, le Christ lui-même nous a donné ce commandement : que celui qui aime Dieu aime aussi son frère. (1Jn 4.20-21)

    Que l’Éternel nous accorde sa grâce pour mettre sa Parole en pratique avec sagesse et discernement. C’est-à-dire, comment et quand. Amen.

  2. La grâce concerne le salut. La loi concerne notre bonheur ici-bas. Cette dernière ne s’applique plus en tant que condition pour être admis auprès du Père. Romains 10 déclare : « Christ est la fin de la loi »…en ce qui concerne le salut.
    Le légalisme n’est souvent que le reluquât d’un esprit religieux qui ne veut qu’attirer l’attention sur soi, sur nos capacités personnelles. Quelqu’un qui cherche à vivre selon la loi, finit par refuser de croire que quelqu’un d’autre que lui-même peut le tirer d’affaire. Étrangement, en voulant plaire à Dieu, il ne se rend pas compte qu’il génère le contraire. Il s’emploie à appliquer des règles et des lois afin de « gagner » l’approbation. Je me vois encore aujourd’hui (eh oui!) dans ce vieil homme et je dois lutter contre cela à chaque instant.
    Le régime de la grâce n’est certainement pas un congé des commandements, elle ne fait que tuer l’effet du péché sur l’âme du véritable croyant…qui s’en repend. Cette sublime grâce nous fait au contraire, considérer davantage les instructions de Dieu, aimé ses commandements et nous encourage à lui obéir de cœur (générant spontanément, par sa seule grâce, une capacité de les respecter). Reconnaitre que nous répétons continuellement les mêmes péchés (ou presque), tout en sachant que le pardon est accordé à chaque fois, c’est le miracle de l’Esprit-Saint. C’est comprendre ce que l’Écriture enseigne de la miséricorde de Dieu. Si nous saisissons cela, nous marchons selon l’Esprit. Nous devons aussi savoir que de persister dans un ou plusieurs péchés, peut nous occasionner des pertes ici-bas. Bien qu’à chaque fois nous soyons bénéficiaire de Son pardon, une conséquence (partielle ou totale) de notre mauvais comportement, peut toujours s’appliquer. Nous rappelant qu’Il nous offre sa grâce infinie et, invitant nos paires a accordé ce même pardon « septante fois sept fois », notre Dieu nous renvoie libre en nous exhortant en ces termes : « va, et ne pèche plus » (Jean 5 et 8)
    L’histoire humaine sera toujours sous influence des mêmes tensions, peu importe l’époque, parce que c’est la nature de ceux qui la font (l’histoire) qui ne change pas. Mais qu’est-ce qui trouble tant le cœur humain et pourquoi n’arrive-t-il pas à trouver l’équilibre entre l’application de la loi et l’expérience de la grâce ?
    Pourquoi cette confusion entre légalisme et grâce ? Comment cette difficulté fait tant couler d’encre et confond tant de cœurs ? La chute bien entendu. À lui seul, cet événement a carrément plongé l’histoire dans un chaos qui ne prendra fin qu’au grand Jour du Jugement de notre Dieu. Ceci dit et compris, l’espoir de trouver l’équilibre parfait n’est plus l’objectif pour celui qui cherche la face de Dieu. L’application de quelques règles que ce soient (les dix commandements ou toutes autres conventions qu’on se donne), n’est rien d’autre qu’un sentiment de croire que l’on peut par nous-même, parvenir à démontrer certaines capacités d’être en règle et attirer la faveur de Dieu. Cela prend bien souvent la forme d’un esprit religieux et non, ce n’est pas le propre des grandes religions. Le croyant évangélique est tout aussi exposé à ce réflexe malsain. C’est profondément enfoui dans nos consciences que cela se joue. Caïn a été l’archétype de cette nature en espérant obtenir l’attention du Créateur par une approbation de son travail (son offrande, fruit de son travail ; expression de sa « religion »). Il nous a transmis son “gène” et personne n’y échappe sauf, celui sur qui Christ agit.
    Nous qui avons Christ (lui qui est plein de cette grâce), avons le privilège d’expérimenter l’homme nouveau et cela passe par le miracle du renouvellement de notre intelligence. C’est son œuvre et non la nôtre. Invoquons-le afin qu’il nous accorde de vivre cette transformation et d’être pénétré par Sa grâce. Tout cela afin d’en être le juste reflet parmi les nôtres. Si le Seigneur a été la parfaite incarnation de cette grâce, si cela lui a valu le rejet puis la crucifixion…pourquoi en serait-il autrement pour ceux qui s’en approche ?

    Qu’il vous soit donné frères d’être renouvelés en Lui.

  3. Que veux dire étant sous la loi de Christ ?
    1 Corinthiens 9:20 Avec les Juifs, j’ai été comme Juif, afin de gagner les Juifs; avec ceux qui sont sous la loi, comme sous la loi quoique je ne sois pas moi-même sous la loi, afin de gagner ceux qui sont sous la loi; 21 avec ceux qui sont sans loi, comme sans loi quoique je ne sois point sans la loi de Dieu, étant sous la loi de Christ, afin de gagner ceux qui sont sans loi.

    • Etre sous la loi de Christ implique d’honorer les exigences de J.C. et ce notamment dans le fait de nous aimer les uns les autres. Si dans l’ancienne alliance, la LOi éclairait négativement la conduite pécheresse des hommes, la loi de Christ éclaire le comportement que devrait adopter un élu.

  4. J’ai le sentiment qu’il y a des gens qui ne sont pas nés spirituellement et dont on endors la conscience par une conception de “la grâce” qui n’est pas celle de Dieu. Souvent la discipline demandée par le Christ à l’égard du pécheur qui se manifeste parmi nous et qui ne veut pas se repentir n’est pas appliquée. Le Seigneur nous dit de regarder un tel hommme comme un non converti. Mat_18:17 S’il refuse de les écouter, dis-le à l’Église; et s’il refuse aussi d’écouter l’Église, qu’il soit pour toi comme un païen et un publicain.

    Oui Dieu fait preuve d’une grande grâce pour tout homme qui se repend et il y a beaucoup de gens en cheminement pour lesquels il fait preuve de miséricorde même parmi des baptisés. Le problème c’est qu’on a une théologie qui empêche les baptisés non encore nés de nouveau de comprendre qu’ils ne sont pas entrés par la porte.

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