Crise des migrants, quelle solution?

La crise des réfugiés syriens provoque bien des remous émotifs chez les chrétiens qui se sentent ici coincés entre deux nécessités. D’une part l’Évangile invite le serviteur de Dieu à faire preuve de compassion et d’humilité en toute chose. Mais d’autre part, un chrétien est aussi un citoyen du monde capable de réfléchir sur les enjeux politiques et sociaux qu’implique la montée de l’islam radical en Syrie. Tout le monde sait que la paix est de loin préférable à la guerre. Mais un tel énoncé suscite tout de même une question hautement pertinente : quel est donc le moyen le plus efficace qui permettra d’obtenir cette paix désirée de tous? Le pacifisme, une intervention militaire, ou les deux?

Solution militaire ou pacifiste?

Nombreux sont les chrétiens qui hésitent à appuyer la solution militaire, car elle leur parait anti biblique dans la mesure où cette solution entraine forcément la mort de milliers de gens innocents. Voilà pourquoi la solution pacifique leur semble corresponde davantage aux valeurs de l’Évangile. Ici, la parabole du bon Samaritain est tout indiquée pour justifier l’aide qui doit être apportée même à un ennemi potentiellement dangereux. Certes, la violence et l’indifférence ne sont pas des solutions bibliques. Or la solution pacifique est une approche immobiliste qui entrainera aussi la mort de milliers d’innocents en Orient. Ne rien faire, c’est laissé des femmes et des enfants aux mains d’extrémistes religieux sans pitié.

Dieu est-il un pacifiste?

Je sais que bien des chrétiens seront tentés de répondre oui à cette question. Mais attention, si on veut répondre bibliquement à cette question, il faudra regarder l’ensemble de l’Écriture et prendre connaissance d’un certain nombre de fait important. L’Écriture semble distinguer entre deux sortes de responsabilités : celle qui relève de l’individu et celle qui relève des fonctions de l’État. Cette distinction est présente dans les deux testaments et montre assez clairement que l’État détient de Dieu le pouvoir d’intervenir militairement lorsqu’une situation l’exige. Dans sa lettre aux Romains, l’apôtre Paul rappelle que le magistrat, même romain, détient une autorité divine qui lui permet de corriger le mal[1]. Je sais que ce texte ne traite pas directement d’intervention militaire, mais il montre que Dieu peut fort bien approuver l’usage de la force pour freiner le mal. L’amour de Dieu n’exclut nullement le jugement divin sévère contre ceux qui font le mal.

Nous connaissons également l’épopée du roi David qui poursuivit les Amalécites parce que ceux-ci avaient enlevé les femmes et les enfants des hommes de son armée à Tsiklag. Voyez la réponse que Dieu donne à David dans cette circonstance : « Et David consulta l’Éternel, en disant : Poursuivrai-je cette troupe ? L’atteindrai-je ? L’Éternel lui répondit: Poursuis, car tu atteindras, et tu délivreras.[2] » Le Dieu qui donna à David cette réponse est exactement le même qui s’est incarné dans la personne de Jésus-Christ il y a de cela deux mille ans. David allait-il laisser ses femmes et ses enfants périr entre les mains de ses ennemis, certes non.

Confusion des rôles

Ce qui me parait de plus en plus net est que nous, chrétiens, distinguons plutôt mal le rôle de l’État dont le mandat est d’assurer le droit et la justice et non de prêcher l’Évangile. C’est aux chrétiens que revient le rôle d’être des témoins de Jésus-Christ par l’Évangile. Si le gouvernement canadien autorise l’entrée massive de réfugiés syriens, ce sera à nous comme citoyens chrétiens de répondre aux besoins de ces gens en les accueillant, peut-être même dans nos maisons. Notre rôle individuel n’est pas de combattre des ennemis quelconques, mais de tendre la main à ceux qui, en chemin, ont besoin d’aide.

Mais aussi cette affaire relève également du domaine de la stratégie géopolitique qui implique, malheureusement, une intervention militaire musclée en Syrie, car là aussi des millions de personnes souffrent et notamment des femmes et des enfants laissés à eux-mêmes en ce moment. Là aussi la Bible est claire les amis,

« 11 Délivre ceux qu’on traîne à la mort, Ceux qu’on va égorger, sauve-les ! 12 Si tu dis : Ah ! Nous ne savions pas ! …  Celui qui pèse les cœurs ne le voit-il pas ? Celui qui veille sur ton âme ne le connaît-il pas ? Et ne rendra-t-il pas à chacun selon ses œuvres ? [3]»

Le pacifisme de certains n’est rien de plus qu’une naïveté émotive soumise aux grandes utopies de l’histoire humaine. Comme le mentionne Carl Bouchard[4] « La paix est un état parfait que seule l’utopie prétend réaliser complètement. Pour autant, cet idéal compte parmi l’une des grandes constantes sociales et politiques de l’aventure humaine, un mythe de Sisyphe constamment renouvelé. [5]»

Le pacifisme au parfum d’émotions que récupèrent actuellement certains de nos politiciens est un raisonnement circulaire qui se suffit à lui-même.   Il neutralise l’action de ceux qui le vénèrent à chercher des solutions négociées qui ne fonctionnent jamais avec des radicaux, des extrémistes et des débiles en liberté. L’histoire le confirme depuis toujours. Si l’Occident n’intervient pas militairement en Orient, ce sont des millions et des millions de personnes qui mourront parce que nous aurons préféré nous entretenir d’idéologies bourgeoises devant un apéro bien corsé. Rappelons-nous que le génocide du peuple juif de la Seconde Guerre mondiale et les 50 millions de morts que cette guerre a générés sont en partie dus à la naïveté des mouvements pacifistes américains qui préféraient croire à une solution diplomatique.

Conclusion

S’il est vrai que le Canada pourrait toujours faire mieux en matière d’aide humanitaire dans ce genre de crise, il n’est pas pour autant vrai que la solution militaire doit être écartée.

Je suis chrétien et à ce titre, mon église et ceux qui la fréquentent sont activement impliqués en Haïti sur le plan humanitaire (600 enfants nourris chaque jour) sans oublier les investissements qui sont faits dans 4 pays africains pour soulager la misère. Malgré cela, je distingue les actions politiques nécessaires qui doivent être mises en place pour régler certains conflits qui n’ont d’autres solutions que l’intervention militaire.

Je suis chrétien et j’annonce l’Évangile, mais si un truand voulait s’en prendre à ma femme et mes enfants, il aurait affaire à un PÈRE de famille vigoureux qui défendrait la vie de ses bien-aimés.

Réal Gaudreault (pasteur)

[1] Rom 13 : 4 : «Le magistrat est serviteur de Dieu pour ton bien. Mais si tu fais le mal, crains ; car ce n’est pas en vain qu’il porte l’épée, étant serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal. »

[2] 1 Samuel 30: 8

[3] Proverbes 24: 11

[4] Professeur d’histoire à l’Université de Montréal

[5] http://histoire.umontreal.ca/fileadmin/Documents/FAS/histoire/Documents/5-Departement/Plans_de_cours_syllabus/HST3253-A14.pdf

 

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